Champs de Beauce

Déjà Août s’enfuit…

J’ai traversé la Beauce aujourd’hui. L’été m’a volé mon paysage. Disparus le bleu des champs de lin, le rose des champs de pavots, le jaune étincelant des champs de colza, les orges courbées sous le vent, les blés fièrement dressés et les coquelicots éphémères et écarlates.

Les moissons sont faites, les champs sont sans âme, dépouillés de leurs cultures, roussis par le soleil, détrempés par les orages de la nuit. Tout est uniforme, rasé. Je préfère encore les jachères prometteuses d’autres étés. La Beauce après les moissons ça a juste un goût d’absence, sans doute parce qu’août apporta trop de deuils dans toute mon existence. Je pourrais aligner quelques prénoms, raconter quelques histoires, poser des mots d’amour sur quelques vieilles pierres tiédies de soleil. Mais tous ceux qui m’ont quittée en été aimaient trop les fleurs des champs et leur simplicité. Il est trop tard déjà pour les bouquets à l’impromptu, vous savez ces bouquets que l’on compose d’un geste distrait parce que les couleurs de leurs fleurs s’accordent si bien qu’on n’a pas besoin d’y réfléchir.

Alors dans quelques jours, j’irai au bord de la mer, je ramasserai quelques petits coquillages sans prétention et je les poserai sur le sable mouillé en forme d’alphabet géant, une lettre pour chacun d’eux. Ce sera ma façon de leur dire encore combien je les ai aimés. Et là, je m’assoirai  dans la nuit qui tombera, je les contemplerai encore une fois, je les sentirai près de moi.

Et l’aube me ramènera vers la vie et ceux que j’aime.


Annie K. Barbier

 

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